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Interview avec Abdoulaye Touré, Secrétaire Général de l’OFT

10 / 05 / 2021

Bonjour M. Abdoulaye TOURE. Vous êtes le Sécrétaire Général de l'Observatoire de la Fluidité des Transports. Pouvez-vous faire la présentation de l’OFT?


L’Observatoire de la Fluidité des Transports est une structure administrative du ministère des transports qui est en charge, d’une part, de veiller à la fluidité du système national des Transports, et d’autre part, de faire des suggestions et recommandations pour la bonne marche du secteur des Transports en particulier. Ces missions nous amènent à être sur le terrain dans le cadre de plusieurs types d’activités. Nous avons des missions qui consistent à lever tous les barrages illégaux qui sont constitués sur le territoire. Cette activité s’inscrit dans le strict respect de la circulaire interministérielle prise en 2011 instituant 33 localités habilitées à avoir des barrages routiers. Je voudrais d’entrée, permettre au grand public de faire la distinction entre les différents de postes que nous avons sur les routes. Un barrage, c’est lorsque toutes les forces commises au contrôle sont représentées. Il s’agit de barrages routiers qui sont généralement à l’entrée ou à la sortie d’une agglomération. Les autres types de postes sont des postes comme leurs noms l’indiquent. Par exemple, entre deux agglomérations il peut y avoir des postes d’observation. Et autour, en général des postes de sécurité pour sécuriser les opérations de contrôle.


L’OFT effectue des missions de terrain pour améliorer la fluidité routière. Pouvez-vous nous en dire plus?


Il convient de dire, que c’est à tort que nous sommes appelés l’observatoire de la fluidité routière, nous sommes l’observatoire de la fluidité des Transports, c’est-à-dire les 4 modes de Transport. Le routier se taillant la part du lion, nous sommes beaucoup plus présents sur la route. Nous faisons des missions de lutte contre le racket. Ces missions comportent plusieurs volets. Un volet de démantèlement de tout ce qui est barrages ou postes illégaux. Cela consiste à vérifier si les agents présents sur les routes ont été vraiment mis en mission par leur hiérarchie et que l’activité à laquelle ces agents s’adonnent est conforme à la prescription sur leur bulletin de service. En plus de tout cela, nous profitons pour faire de la sensibilisation. Elle concerne les forces commises au contrôle. Et tous les usagers de la route notamment les professionnels du secteur routier les conducteurs et les transporteurs. Nous rencontrons lors de nos missions les autorités et différents commandements avant les opérations de démantèlement et de sensibilisation. A la fin, des comptes rendus sont fait avec les préfets. L’Observatoire est aussi présent à l’aéroport depuis 2017. Nous faisons des efforts pour organiser la desserte de l’aéroport en taxis-compteurs. Nous avons également un centre d’écoute afin de rapprocher l’administration des Transports de l’usager, sous instruction du ministre des Transports Amadou Koné. Il a été renforcé par la présence de l’unité de lutte contre le racket. L’OFT est présent au sein du Comité de validation des études d’impact social et environnemental qui sont dirigées ou validées par l’ANDE où nous faisons des recommandations et suggestions. Enfin l’OFT abrite en son sein le Comité National de Facilitation des Transports et du transit routier inter-Etat. A ce titre nous menons des activités sur l’ensemble des corridors économiques de la Côte d’Ivoire sur instruction de l’UEMOA et de la CEDEAO. Dans le ce cadre de nos activités, nous tenons à faire en sorte que la traversée de notre territoire ne soit pas la croix et la bannière pour les acteurs des pays de l’hinterland qui viennent fréquenter nos ports. Le CNF met en œuvre les postes de contrôle juxtaposées qui sont une composante du programme communautaire des infrastructures sous régionales.


Où sommes-nous aujourd’hui au niveau du démantèlement des barrages ?


Il existe conformément à la loi, 33 localités qui peuvent abriter des barrages. Si on prend le cas de Yamoussoukro qui est une localité habilitée à abriter des barrages, on verra sur chacun de ses axes qui viennent ou partent de la ville des barrages. C’est en 2011 que la circulaire interministérielle a limité les nombres de localités à 33, mais nous avons connu aussi un gros souci d’insécurité avec le phénomène de coupeurs de route. Il a perduré jusqu’à l’autorisation du Président de la République à de déployer la brigade mobile de la Gendarmerie au travers de l’opération « Renard ». De ce point de vue, on verra des postes d’observation en nombre assez important. Le mal, c’est que ces postes d’observation se muent en postes de contrôle. Mais leur mission première n’est pas de faire du contrôle routier. Le poste d’observation a pour mission d’observer et d’intervenir en cas de besoin. Ce qui explique la recrudescence des postes d’observation. Ce phénomène conjugué au fait que l’Observatoire ait traversé une période difficile avec la raréfaction de ses ressources a rendu l’exercice de nos missions difficile. Heureusement avec l’appui du ministre des Transports, ce sont des choses qui sont en train d’être réglées et nous pouvons repartir de plus belle pour mener la lutte contre le racket et toutes les pratiques anormales sur nos routes.


Dans le cadre de cette relance entamée, qu’est ce qui a été fait ?


Depuis janvier déjà, nous sommes sur le terrain. Nos équipes étaient la semaine dernière à pied d’œuvre sur l’autoroute du Nord jusqu’à Yamoussoukro. Nous avons sensibilisé les acteurs. Nous avons rencontré les Grands Commandements qui nous appuient dans la lutte contre le racket. En son temps nous avions sollicité et obtenu l’appui du ministre de l’intérieur qui nous a autorisés à nous appuyer sur les préfets dans notre mission. Nous ne pouvons que sensibiliser, lever les barrages et faire des recommandations. Dans ce cadre nous faisons un rapport annuel qui permet de savoir l’évolution des choses. Depuis 2008, la dernière étude de la Banque Mondiale sur le racket en Côte d’Ivoire faisait état de 350 milliards de FCFA environ combinés de pertes et d’environ 150 milliards de FCFA en pertes directes. Avec celle que nous avons menée nous-même, nous sommes aux alentours de 11 milliards de perte sur nos routes. Evidemment si nous dormons sur nos lauriers, c’est sûr que le phénomène repartira de plus belle. Le pays est confronté par ailleurs à un problème de sécurité, avec les attaques subies, ce qui fait que l’Etat est obligé de dégager des moyens supplémentaires pour sécuriser les biens et les personnes. Evidemment la lutte contre le racket prendra un coup.


Pouvez-vous parler davantage des postes de contrôle juxtaposés (PCJ) que vous comptez mettre en place ?


Les postes de contrôles juxtaposés font partie du programme sous régional de facilitation que les chefs d’Etat de l’UEMOA et de la CEDEAO ont adopté pour notre sous-région. Il s’agit de faire en sorte que la traversée des frontières soit allégée. Dans le cadre par exemple Côte d’Ivoire/Ghana, la police d’immigration des deux pays va se retrouver dans le même bureau, il en est ainsi pour les douanes et autres services. Ce qui fait qu’une seule transaction sera faite par l’usager pour passer d’un pays à un autre. En ce qui concerne la mise en œuvre de ces projets, il faut préciser qu’il y a deux volets. Le premier est conforme à la convention signée qui fait obligation à l’Etat de Côte d’Ivoire de mettre à disposition le site choisi par le comité interministériel technique de la sous-région et de réaliser les infrastructures connexes. Et que les populations soient indemnisées. Il s’agit ici d’évaluation des offres que chacun des pays a eu à faire. La Côte d’Ivoire a, sur la base de l’évaluation du Comité mixte, bénéficié de 5 postes. Au niveau de Noé entre notre pays et le Ghana, nous avons pratiquement fini nos obligations. Il ne reste que le déplacement de la ligne haute tension. Nous pensons que d’ici la fin de l’année ce sera fait. Pour ce qui est de Laléraba, entre la Côte d’ivoire et le Burkina Faso, les travaux sont également en cours pour la réalisation de cette infrastructure. En ce qui concerne la frontière guinéenne les projets sont récents. Mais nous avons fini avec les indemnisations et nous venons de lancer l’appel d’offres pour la réalisation des infrastructures connexes à savoir, école primaire, centre santé et autres. A côté de chaque PCJ, il y a des sites prévus pour abriter les aires de stationnement et de repos. Le ministre Amadou Koné tient à ce que le programme de professionnalisation soit accompagné. Sur ces sites les conducteurs pourront se reposer, se restaurer, se faire soigner en cas de besoin et attendre tranquillement pour traverser la frontière.


La Covid-19 a-t-elle eu un impact sur vos activités?


En ce qui concerne les pandémies ou épidémies de façon générale, nous avons été fortement impliqués dans la fièvre à virus Ebola avec la mise en place d’une cellule d’observation et de veille épidémiologique en liaison avec l’Institut National de l’Hygiène Publique. En nous inspirant de cette expérience, l’OFT sous instruction du ministre des Transports, n’a pas attendu qu’il y ait une autre pandémie pour pouvoir réagir. Nous avons conçu une campagne de sensibilisation qui a été mise en œuvre par le cabinet du ministre des Transports. Elle a consisté à faire la sensibilisation et la distribution de masques et de gels hydro alcooliques. Par la suite, on a suivi toutes les mesures prises par le ministre pour faire en sorte que le secteur des Transports ne soit pas le vecteur par lequel la pandémie se propage en Côte d’Ivoire. L’observatoire a été frappé dans la mesure où Abidjan est resté isolé d’Avril 2020 à juillet 2020. Ce qui a empêché nos sorties pour des missions de sensibilisation. Aujourd’hui, nous n’avons pas des outils pour faire un bilan. Mais au vu de son rôle clé et transversal, on peut imaginer que le secteur a été durement impacté avec la restriction des déplacements et la réduction du nombre de passagers par cette pandémie.


La limite d’importation des véhicules de plus de 10 ans n’a-t-elle pas eu d’effet sur votre fonctionnement ?


Effectivement l’OFT vivait à 100 % de la taxe carbone sur les véhicules entrant en Côte d’Ivoire. Depuis 2018 dans le souci d’assainir le milieu et de faire en sorte que les familles ne soient pas infectées par la mauvaise qualité des véhicules avec leur caractère accidentogène, et l’impact économique que ces véhicules de mauvaises qualité créent sur les foyers, le Gouvernement à travers le Ministère des Transports a fait en sorte que l’âge des véhicules soit réduit. Ce décret a érodé l’assiette de la taxe carbone. Mais le ministre a fait en sorte que des ressources nous soient trouvées avec l’appui du ministre du budget. Aujourd’hui nous sortons la tête de l’eau.


Comment avez-vous vécu pendant cette période de carence ?


Pendant tout ce temps nous avions réduit nos activités au strict minimum. C’était des sensibilisations au niveau d’Abidjan. Egalement la participation à des projets phares comme le MCC, le PCOGAR, le PAMOSET. Nous sommes partie prenante de ces projets où nous donnons notre avis sur leur impact sur les populations. En réalité on ne chôme pas. Nous avons effectué tout au plus quelques missions, ce qui ne nous a pas permis de sortir les chiffres sur l’étude annuelle au niveau du racket. 2021 est complètement différente et nous allons avoir un chiffre crédible.


Il se dit au niveau maritime et aéroportuaire que les coûts pratiqués sont élevés. Et les procédures un peu lourdes. Comment intervient l’OFT à ce niveau ?


Pour parler du cas spécifique de l’aéroport, c’est l’autorité nationale de l’aviation civile qui est plus outillée sur ces questions. Quand elle est saisie par le gouvernement afin de regarder ces coûts, cela fait objet d’une étude et l’OFT n’a plus à intervenir dans ce secteur. Pareil au niveau maritime où l’OFT a eu l’honneur de présider la commission fluidité de la compétitivité des ports ivoiriens. Au cours de ces échanges nous avons porté la voix de tous les acteurs du secteur maritime. Aussi des efforts sont en train d’être faits par les différentes structures et les différents ministères concernés pour faire en sorte que les recommandations de ces différents séminaires soient appliquées. Au niveau maritime également lorsque les données sont disponibles, nous faisons la promotion des temps de transit, de traversées de nos frontières. Ce sont des études qui ne sont pas menées directement par l’Observatoire. Elles étaient menées par l’organisation des corridors Abidjan/Lagos. Les financements sont malheureusement arrivés à terme. Nous sommes en train de revoir comment reprendre la main sur toutes ces activités avec des financements appropriés.


Parler-nous de de votre collaboration avec les usagers ?


Il est vrai que nous ne communiquons pas assez, mais il faut dire que la communication a un coût. Mais les populations sont associées dans la mesure où nous avons mis en place un centre d’écoute depuis 2017. Ils peuvent nous joindre tous les jours au 86090. A ce jour, nous avons un peu plus de 3000 interventions traitées. Les choses commencent à rentrer dans l’ordre et nous allons élaborer une stratégie de communication à cet effet. Cela est en étude au niveau de la tutelle et je ne peux en dire plus. De nouveaux outils seront élaborés pour une plus grande proximité et participation des usagers à tout ce qui est lutte et politique des Transports.


Parlez-nous des activités du CNF.


L’OFT a une mission nationale tout comme le CNF. Le CNF est toutefois ciblé sur les corridors économiques. Le travail qui est fait au niveau des routes de côte d’Ivoire, ce travail est confié au CNF sur les corridors économiques ivoiriens. Il fait des campagnes de sensibilisations en collaboration avec les 5 Grands Commandements de façon périodique sur les corridors économiques. Le CNF assiste les usagers de l’hinterland qui fréquentent nos ports. Tout ce qui est programme régional ou sous régional est du ressort du CNF.


Qui de vos objectifs à court, moyen et long terme ?


Notre objectif aujourd’hui à travers notre participation au sein du Comité National de Lutte contre la Vie Chère, nous a permis de nous rendre compte qu’il était important de créer pour nous même un nouvel indicateur. Nous l’avons créé et nous sommes en train de le déployer. Jusqu’à maintenant nous nous sommes contentés de dénombrer les barrages, de déterminer leur statut. Puis de voir au sein de chaque barrage combien est collecté par type de véhicule. Cela nous permettait de dégager ce qui était en perte sèche sur toute l’étendue du territoire. Nous avons affiné un des indicateurs, c’est l’impact sur l’usager. Si chaque passage prend 5 minutes, sur 10 barrages pour l’usager, le temps perdu est de 50 minutes. C’est cela que nous essayons de ressortir. Aussi initialement nous avions divisé le pays en zone. Et les chiffres que nous sortions étaient des chiffres par zone qui étaient ensuite agrégés pour donner l’agrégat national. Nous étions revenus pour travailler par axe au vu de certains reproches notamment le fait de ne pas sortir l’impact sur l’usager quand il fait un voyage d’une ville à une autre. Mais nous ce qui nous intéressait c’était de pouvoir transférer les difficultés identifiés aux préfets de région.


Aujourd’hui, nous avons intégré la nouvelle donne des axes. Sur l’axe Bondoukou/ Abidjan par exemple, quand des difficultés sont identifiées, on ne sait pas à qui les confier. Nous sommes donc revenus à notre ancien système qui va consister à mettre les préfets à contribution en leur confiant les difficultés notées sur le terrain. En plus de cela nous avons observé que pour éviter les confusions entre les différents types de postes, il est important de distinguer les postes de contrôle, des postes d’observations. Nous souhaitons que l’aménagement routier intègre le contrôle routier. Que les usagers n’aient pas à s’arrêter quand ce n’est pas un poste de contrôle. L’autre projet concerne la gestion des déchets automobiles. Nous voulons créer un centre de gestion de fin de vie des véhicules en Côte d’Ivoire. Ensuite, avec l’appui de certains partenaires techniques et financiers, nous souhaitons définir des produits phares pour éviter des contrôles routiers intempestifs. Il faudrait que les acteurs se mettent d’accord sur un mode opératoire pour faire en sorte que le déplacement de ces produits ne soit pas l’objet de contrôle excessif. Enfin, nous voulons alléger le dispositif de contrôle pour tous les trafics qui s’éloignent des centres névralgiques ivoiriens. Que ces efforts soient mis sur ce qui rentre sur notre territoire. Nous avons pas mal de projets qui nécessitent des échanges assez approfondis avec les partenaires.


 


 

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